TOUR DU MONDE DE L’HABITAT VU PAR LA SOCIÉTÉ CIVILE

Mali

#Mots-clés : Accaparement des terres, Droit au Logement, Expulsion, Droit foncier coutumier Dernière mise à jour le 11 septembre 2019

Urbanisation

HISTOIRE DES VILLES

Selon une étude d’Africapolis, la population malienne devrait passer de 6,4 millions en 1976 à 16,1 millions en 2020.

La Loi n°96-059 du 4 novembre 1996 portant création de communes est à l’origine de 701 nouvelles communes. Celles-ci sont explicitement dotées d’un territoire ; la création de communes sur la base d’un regroupement volontaire de villages et de fractions de communes (qui n’est pas une simple transformation d’arrondissements en communes) s’accompagne donc d’une réorganisation territoriale au niveau local. Le village n’est nulle part reconnu comme unité administrative : élément constitutif de la commune, il est placé sous son autorité. Les régions, le district de Bamako, les cercles, les communes urbaines et rurales deviennent tous des collectivités locales. L’arrondissement disparaît.

La définition officielle de l’urbain est à double critère. La définition initiale a été adoptée à la suite d’une réunion entre les responsables administratifs : sont «considérés comme centres urbains tous les chefs-lieux de région, de commune et de cercle ainsi que toute localité peuplée de 5000 habitants ou plus».

Selon une projection à partir des données d’e-geopolis, le taux d’urbanisation passerait de 20,9% en 2000 à 25,5% en 2020.

HABITAT URBAIN

HABITAT RURAL

Depuis 1976, la définition d’un village est ”un ensemble de concessions regroupées sur un espace géographique donné et qui abritent des ménages dépendant d’une même autorité locale ou chefferie. Le village compte au moins 100 habitants.

Aspects légaux

DROIT AU LOGEMENT

Depuis 1992, l’article 17 de la Constitution stipule que l’éducation, l’instruction, la formation, le travail, le logement, les loisirs, la santé et la protection sociale constituent des droits reconnus. (2)

UNE GRANDE DIFFERENCE ENTRE L’URBAIN ET LE RURAL (5)

Selon l’association Juristes Solidarités qui a travaillé avec l’association AMADE (Association MAlienne pour le DEveloppement), l’accès au logement reste tributaire de deux systèmes juridiques souvent opposés : le droit moderne de l’Etat, formaliste, basé sur l’appropriation privée de la terre ; le droit coutumier, très souple, axé sur le droit d’usage collectif (familial). Si le droit de propriété est la règle en milieu urbain, donnant ainsi la possibilité à une minorité de citoyens de jouir du droit au logement, en revanche, le milieu rural, zone d’ancrage des coutumes, se caractérise par l’accès de tous les membres de la communauté au logement.

La loi n°96 050 du 16 Octobre 1996, en définissant le domaine privé immobilier des communes, s’applique à toutes ces terres sur lesquelles s’exerce le droit coutumier. Les communes doivent ainsi se référer au code domanial et foncier qui en matière d’habitat fait du droit d’appropriation le principe d’accès au logement. Dès lors, les droits coutumiers sur les terres domaniales deviennent de simples usages précaires, valables tant que les nouvelles autorités communales n’ont pas exprimé de besoins particuliers.

En fait, les communautés rurales étant très pauvres, ce sont les entrepreneurs et certains fonctionnaires qui auront accès à ces terres sous forme de concession rurale ou de maison d’habitation. La croissance démographique étant très élevée en milieu rural, au bout de quelques décennies, une bonne partie des populations autochtones pourrait se trouver sans logement et transformée en ouvriers agricoles puisque toutes les terres auront été vendues par leurs propres élus.

Source : http://www.agirledroit.org/spip.php?article778

EXPULSIONS FORCEES

Amnesty International et l’Union des Associations et Coordinations de Défense des Droits des plus Démunis dénoncent les expulsions forcées qui ont lieu au Mali.

Saloum Traoré, secrétaire général de Amnesty Mali, a indiqué que le Protocole facultatif au PIDESC, adopté en 2008 par les Nations unies, permet aux victimes de disposer, individuellement ou en groupe, d’un recours effectif à la défaillance des Etats. Selon lui, cela permet de lutter contre l’impunité des gouvernements qui n’ont que du dédain à opposer aux personnes les plus vulnérables. Mais, il a estimé que l’intérêt du Protocole n’est pas seulement que d’obtenir réparation pour les victimes. Il a également pour ambition de prévenir les violations, d’inciter à faire respecter les Droits économiques, sociaux et culturels et ainsi faire avancer le droit. L’objectif est dont que l’Etat malien ratifie ce protocole qui permettrait aux habitants de recourir aux Nations Unies en cas d’atteinte de leurs droits économiques, sociaux et culturels.

DROIT FONCIER

Au Mali, le droit foncier se subdivise en droit foncier républicain (terres appartenant à l’Etat) et en droit foncier coutumier.

  • Le domaine foncier de l’Etat est explicité (ordonnance 00-027) par les articles 2b et 28b. Sous l’article 2b, on retrouve l’énumération des immeubles immatriculés, non immatriculés et biens meubles détenus par l’Etat. Sous l’article 28b sont spécifiés les terres non immatriculées appartenant au domaine foncier de l’Etat. Ces articles montrant que les terres non immatriculées sur lesquelles s’exercent des droits d’usage coutumiers ou de disposition, individuels ou collectifs, relèvent du domaine privé immobilier de l’Etat. Cela veut dire que l’Etat peut en disposer sans en rendre compte à qui que ce soit, autrement dit, l’Etat est propriétaire de ces terres.
  • Les droits des chefs coutumiers : la Loi confirme les droits coutumiers sur les terres non immatriculées et confère en quelque sorte un certain droit aux utilisateurs, ce qui fait que l’Etat doit recourir à la procédure de purge s’il veut récupérer ces terres. L’ordonnance 00-027, en son article 43 confère des droits sur les terres aux chefs coutumiers : “les droits coutumiers exercés collectivement ou individuellement sur les terres non immatriculées sont confirmées. Nul individu, nulle collectivité, ne peut être contraint de céder ses droits si ce n’est pour cause d’utilité publique et moyennant une juste et préalable indemnisation. Nul ne peut en faire un usage prohibé par la loi ou par ses règlements.” L’Etat réaffirme ainsi la supériorité du droit républicain sur le droit coutumier, puisqu’il a le pouvoir d’exproprier pour cause d’utilité publique. Cependant, l’article 44-4 semble restreindre ce droit d’expropriation : “les chefs coutumiers qui règlent, selon la coutume, l’utilisation desdites terres par les familles ou les individus, ne peuvent en aucun cas se prévaloir de leur fonction pour revendiquer d’autres droits sur le sol, autre que ceux résultant de leur exploitation personnelle en conformité avec la coutume.” Il apparaît que les droit coutumiers se limitent uniquement à des droits d’exploitation, il n’est pas question de droit de disposition. Ceci exclut par conséquent la possibilité de céder des parcelles. Pourtant, la cession de parcelles par les chefs coutumiers est une pratique courante.

Source : Guide juridique – Les ressources naturelles, les collectivités, leurs territoires, PACT Mali, en collaboration avec des partenaires. (3)

ACCAPAREMENT DES TERRES

Au Mali, les terres sont bradées par l’Etat : elles figurent sur les cartes géographiques spécialement destinées aux investisseurs et établies à partir de données satellitaires. Or ces espaces arables sont occupés par des familles de paysan-ne-s depuis des générations, qui les ont préservés à travers une gestion collective, empreinte de sagesse et des pratiques agricoles respectueuses de l’environnement et des territoires.

Le postulat étatique d’appartenance (du terrain) a facilité les accaparements de terres qui se sont multipliés ces dernières années. L’Etat déguerpit sans respecter aucune disposition réglementaire, et encore moins les conventions internationales ni aucun droits humains. Que ce soit en zone urbaine, péri-urbaine ou rurale, les habitant-e-s se retrouvent spolié-e-s de leurs terres et de leurs logements au nom de l’urbanisation, des réaménagements de quartiers, des projets agro-industriels, et ce le plus souvent manu militari.

En effet la corruption, les relations des élites avec les administrations et la justice et le recours aux forces de l’ordre sont les trois outils utilisés par l’État et les investisseurs au détriment des habitant-e-s. Ces dix dernières années, des titres fonciers sont apparus comme par magie parfois trois fois sur la même parcelle. L’impunité de ces actes et la désorganisation de l’État qui lui-même ne fait pas respecter le droit, amène à des situations catastrophiques sur le terrain. Les politiques publiques qui devraient régir et protéger le peuple malien ont été détournées au profit de politiques privées qui ne songent qu’à leur intérêt personnel.

Pratiques intéressantes

Aspects sociaux et économiques

MARCHE DU LOGEMENT

QUALITE DES LOGEMENTS

HABITAT INFORMEL / BIDONVILLE / SANS-ABRI

Rôle des pouvoirs publics

Les pouvoirs publics maliens se sont engagés à soutenir des politiques de logement (depuis 2013) selon les grands axes suivants :

  • Réalisation et gestion de logements sociaux
  • Promotion et vulgarisation de matériaux locaux de construction
  • Promotion de logements sociaux et de l’autoconstruction assistée vias des sociétés coopératives d’habitat
  • Réalisation de travaux d’aménagement

HABITAT SOCIAL

Le coup d’Etat en 2012 avait marqué un frein dans le développement du logement social au Mali. Cependant, le processus a repris depuis 2013 …

Le Gouvernement malien a eu pour ambition de créer 50.000 logements sociaux entre 2013 et 2018, via son opérateur l’Officie Malien de l’Habitat (OMH). Ce programme s’est réalisé à travers un partenariat public/privé auxquels sont associés la Société Immobilière et Foncière du Mali (SIFMA), Ecobank Mali et Shelter Afrique. En 2014, des études ont été menées afin de créer un cadre juridique d’attribution des logements sociaux, de nombreuses voies de la société civile estimant que jusqu’alors ces logements étaient principalement attribués aux « riches ». Source : Maliactu.net

Un mécanisme de Garantie des Programmes de Logements sociaux a été mis en place afin de pérenniser l’action entreprise. Il s’agit d’un outil stratégique de la politique du logement au Mali. L’objectif est double : assurer une couverture des risques de défaillance des bénéficiaires par une garantie de remboursement des échéances et mobiliser des ressources pour poursuivre ce programme sans recours direct et permanent au budget de l’Etat. En ce qui concerne les bénéficiaires, ils peuvent ainsi profiter d’une location-accession sur une durée de 25 ans au terme duquel ils deviendront pleinement propriétaires. Le Fonds de garantie devrait leur permettre de faire face aux accidents de la vie tel un décès, sans perdre leur logement. Pour en savoir plus : http://www.fghm-sa.com/logmt_sociaux.php

Bibliographie & Sitographie

  1. AFRICAPOLIS, Dynamique de l’urbanisation, 1950-2020 : approche geo-statistique – Afrique de l’Ouest, par AFD, pp 61 à 67, 2011.
  2. CETIM (publication COHRE)
  3. Guide juridique“Les ressources naturelles, les collectivités, leurs territoires”, PACT Mali, en collaboration avec des partenaires.
  4. Chantal Jacovetti de CNOP/Via Campesina et Massa Koné d’UACDDD/UNION/No Vox, “La lutte contre les accaparements de terre au Mali”, littérature grise, décembre 2013.
  5. Juristes Solidarités, “Décentralisation et droit au logement en milieu rural au Mali : prévenir les possibles dérapages”, maliweb.net

Selon la société civile

Problèmes majeurs

Constats posés par la Convergence Malienne contre les Accaparements de Terre (CMAT) :

  • Les habitants réalisent aujourd’hui qu’ils ne sont pas considéré-e-s comme des acteurs et actrices à part entière, que les accaparements de terres sont faits sans consultation, sans concertation.
  • En plus de perdre leur terres, l’accès à leurs ressources naturelles et point d’eau, les habitants sont réprimés : des femmes enceintes ont perdu leur enfant, certains sont gazés, emprisonnés de long mois arbitrairement.
  • Des zones considérées comme le grenier du Mali, avec des paysan-ne-s qui nourrissaient leurs familles mais aussi le peuple malien se sont retrouvées dégradées en des zones pas assez productives pour assurer leur souveraineté alimentaire. Le riz est en train de remplacer les céréales de base : le mil et le sorgho.
  • Les “bras” valides quittent les villages pour aller travailler dans d’autres champs, parfois à plus de 20 Kms !
  • Les jeunes femmes partent dans les centres urbains pour se faire exploiter comme “bonnes”.
  • Les hommes, jeunes et vieux, vont – au péril de leur vie – faire de l’orpaillage, tenter de traverser la Méditerranée, voire s’enrôler dans des groupes armés.
  • Les travaux des investisseurs perturbent les voies de circulation habituelles, obligeant les habitants à faire de longs détours.
  • Les produits chimiques pulvérisés sur les champs accaparés rendent les habitants malades. Ils n’ont pas les moyens de se soigner.
  • Les bulldozers détruisent récoltes, arbres, maison, cimetières, lieux de culte, etc. Ces perturbations remettent en cause l’identité territoriale, avec des conséquences lourdes sur l’organisation sociale des membres du village, voire sur les familles qui se disloquent.

Revendications

Quelques acteurs

  • AME – ASSOCIATION MALIENNE DES EXPULSES = L’association s’occupe de fournir accueil, assistance et orientation aux expulsés qui arrivent à l’aéroport démunis et sans avoir pu contacter leur famille. L’association met en place une assistance juridique en leur faveur afin qu’ils récupèrent leurs biens, abandonnés dans les pays expulseurs et qu’ils recouvrent leurs droits. Site internet
  • ARACEM – ASSOCIATION DES REFOULES D’AFRIQUE CENTRALE AU MALI = Rassembler et accueillir tous les refoulés / déportés ressortissants d’Afrique centrale vivant en Afrique de l’ouest afin de consolider les liens de solidarité et d’entraide. Objectifs : prise en charge des refoulés/ déportés, dénoncer les violations des Droits de la personne et discriminations, encourager et faciliter le retour volontaire des migrants dans leurs pays d’origine, sensibiliser le candidat à l’immigration sur les risques, dangers, et les conséquences du parcours clandestin. Site internet
  • CONVERGENCE MALIENNE CONTRE L’ACCAPAREMENT DES TERRES (CMAT) = réseau composé de 138 associations qui s’insurgent contre le phénomène grandissant de l’accaparement du foncier au Mali. Les militants réalisent d’une part des documents d’information et des mémorandum sur le sujet, d’autre part, des actions plus directe de manifestation (sit-in). Blog Mediapart
  • PORTAIL DE LA SOCIETE CIVILE MALIENNE = Le Forum des Organismes de la Société Civile au Mali est un espace informel de concertation et d’action entre les organisations de la société civile. Son adhésion est libre et volontaire pour toute organisation de la société civile de 3ème ou 4ème niveau. Il est composé d’organisations structurées, autonomes, reconnues officiellement et qui dialoguent déjà avec les autres acteurs de développement. Il fonctionnement notamment via l’organisation de groupes thématiques. Site Internet
  • AMNESTY INTERNATIONAL MALI =
  • UNION DES ASSOCIATIONS ET COORDINATIONS DE DEFENSE DES DROITS DES PLUS DEMUNIS (UACDDD) =